Le mercredi 9 octobre 2019, le prix Nobel de chimie fut attribué à l’Américain John B. Goodenough, à l’Anglais Stanley Whittingham et au Japonais Akira Yoshino, pour l’invention des batteries au lithium-ion. Le comité Nobel a expliqué que ces batteries avaient « révolutionné nos vies » et “posé les fondations vers une société sans fil et libérée des énergies fossiles”.
Il est vrai que ces batteries au lithium font aujourd’hui littéralement partie intégrante notre quotidien, que ce soit dans nos ordinateurs, smartphones, caméras, appareils photos, vélos électriques, consoles de jeux vidéo, montres…
En outre, la révolution des voitures électriques a engendré une augmentation exponentielle de la consommation de ces batteries, qui apparaissent de fait comme l’une des solutions majeures à tous nos problèmes environnementaux ! Cependant, le lithium, composant de la grande majorité des batteries, semble suivre exactement le même chemin que le pétrole 100 ans plus tôt. Cet or noir, ressource miracle qui nous semblait plus « propre » que l’ancienne ressource en vigueur le charbon, a été surexploité. Aujourd’hui, les scientifiques sont mis au pied du mur et contraints de trouver une alternative à cette énergie fossile, presque entièrement épuisée.
Mais pour les futures générations, la mutation à un « tout batterie électrique » sera elle une mutation durable ?
En effet, avec la demande grandissante en batterie de tous types, une nouvelle crise semble se profiler. En seulement deux ans, entre 2016 et 2018, le prix du lithium a déjà doublé ! Par ailleurs, les récentes études ont démontré qu’il n’y aurait pas assez de lithium pour soutenir la croissance du marché des batteries, en raison notamment de l’envolée du marché des véhicules électriques. De plus, deux autres problèmes ont été également mis au jour par l’ensemble de la communauté scientifique. Ces problèmes sont relatifs au cycle de production et de recyclage des batteries, qui mettent à mal l’environnement.
Premièrement, le processus de production varie selon les modèles. Les piles et les batteries peuvent contenir nickel, lithium, zinc, cadmium et mercure. Or ces ressources qui, pour certaines comme le lithium, sont très rares, sont issues d’une extraction particulièrement polluante engendrant notamment de fortes émissions de CO2. Selon l’étude d’Uniross, entreprise spécialisée dans la pile rechargeable, la production du nombre de piles nécessaire à 1 kWh d’énergie, contribue, à même échelle, au changement climatique, que 457 km parcourus en voiture. Mais la production est loin d’être l’unique problème de ces batteries électriques.
Le second inconvénient, et non des moindres, concerne le traitement des piles et batteries usagées. Le recyclage est bel et bien une autre problématique fondamentale car il demande beaucoup d’énergie et de ressources. De plus, les batteries sont différentes selon les constructeurs. Il est donc difficile de créer un processus de recyclage standardisé. Et, même en réussissant à les recycler, les scientifiques ne sont aujourd’hui pas en mesure de récupérer 100% des matériaux utilisés dans les batteries. A titre d’exemple, un élément chimique tel que le lithium est très difficile à collecter sous forme suffisamment pure afin de pouvoir être réutilisé.
Néanmoins, le recyclage demeure un processus essentiel car les batteries non traitées sont très polluantes et nocives pour notre environnement : elles peuvent générer des gaz écotoxiques ou encore des polluants contaminant les sols ! Selon une étude de l’EPBA (European Portable Battery Association), au sein de l’Union européenne, seulement 45 % des batteries seraient collectées pour être recyclées. Or quand celles-ci ne sont pas récupérées, les batteries sont jetées dans la nature, incinérées ou enfouies. Un véritable drame écologique, qui est par ailleurs de plus en plus dénoncé par de nombreuses organisations. C’est le cas de l’ONG Amnesty International, qui reproche aux entreprises productrices de voitures électriques, leur malhonnêteté et leur hypocrisie lorsqu’elles font passer leurs véhicules comme écologiques. En effet, la fabrication des batteries nécessaires à leur conception consomme un grand nombre de combustibles fossiles et de minéraux rares. Ainsi, les usines de production de batteries lithium-ion pour les véhicules électriques, concentrées en Chine, en Corée du Sud et au Japon, dépendent en grande partie du charbon ou d’autres combustibles fossiles. Amnesty International appelle ces secteurs à concevoir d’ici cinq ans de nouvelles batteries respectueuses de l’environnement et à plus de transparence dans leur communication pour rendre publics leur empreinte carbone et leurs chaînes d’approvisionnements en métaux.
A l’heure actuelle, de nombreux chercheurs travaillent sur de nouveaux procédés chimiques, plus ou moins avancés, pour des batteries plus écologiques et durables qui remplaceraient le lithium ou encore le cobalt par des matériaux moins rares et moins toxiques. L’espoir de trouver une ressource durable, non nocive pour l’environnement, pourrait ainsi enfin se concrétiser dans les années à venir !